Promulguée samedi dernier et inscrite au Journal officiel, la loi Création et Internet, dite Hadopi, prend désormais effet mais dans une version provisoire et assez limitée. Le texte a été modifié profondément pour tenir compte des oppositions du conseil constitutionnel. Celui-ci a en effet refusé que le pouvoir de couper l'accès à Internet d'un internaute suspecté de téléchargement illégal soit confié à une autorité administrative, en l'occurrence l'Hadopi (Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet).
Parce qu'il est considéré comme un droit, cet accès au réseau mondial ne pourra être confisqué que par la Justice, donc après un procès, un jugement contradictoire et selon le principe de la présomption d'innocence. Le rôle de l'Hadopi se trouve réduit aux avertissements, qui prendront la forme de courriers électroniques et de lettres recommandées envoyées aux suspects.
Il devrait s'agir d'un travail imposant si les objectifs de Christine Albanel, ministre de la Culture et en charge du projet de loi, sont respectés. Ce sont en effet, chaque jour, 10.000 mails d'avertissement, 3.000 lettres recommandées et 1.000 avis promettant la coupure que devront expédier les employés de l'Hadopi.
L'idée initiale était en effet de parvenir à mille décisions de coupures quotidiennes et 180.000 suspensions d'abonnement par an. De tels chiffres imposent un temps de décision réduit à quelques secondes pour chaque cas, empêchant toute analyse du dossier. C'était, notamment, à l'abonné suspecté de démontrer son innocence après la réception de l'avis de coupure. On voit mal comment des tribunaux, dont on connaît la charge de travail actuelle, pourraient soutenir un tel rythme. Pour l'instant, le gouvernement ne semble pas avoir trouvé le moyen de faire face. La création de tribunaux spécialisés est vaguement évoquée mais les ministères de la Culture et de la Justice ne semblent pas mettre en avant les mêmes possibilités. Bref, le chantier commence à peine.
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